“Vous avez dix-huit ans ?” demandais-je, “J’en ai même vingt !”, “Oh, pardonnez-moi !”... Mais la jeune fille, pharmacienne de son état, n’hésite pas et signe “des deux mains” si l’on peut dire, tant elle est convaincue de la justesse et de la pertinence du RBI. Il est vrai qu’elle a de bonnes raisons pour cela : afin de poursuivre ses études, elle doit dores et déjà s’adresser aux services sociaux pour nouer les deux bouts, ce qui n’est tout de même pas normal... Non, ce n’est pas normal que l’on doive jouer les assistés, alors que l’on veut simplement - et naturellement - apprendre un métier qui nous intéresse, se former pour l’avenir et devenir plus indépendant. Mais le RBI, telle une panacée universelle, pourra remédier à tout cela !
Quant à moi, je poursuis ma trajectoire, à la recherche de nouvelles signatures - tel un fauve sur la piste d’un troupeau de gazelles... Et cela marche pas mal ! Pourtant nous sommes devant le hall de la Gare central de Lausanne, et les gens sont pressés, affairés, dans leurs bulles. Il faut parfois les interrompre dans leurs discussions, les obliger à soulever le nez de leur “smartphone”, à ôter les écouteurs de leurs oreilles ! Quel monde ! Sommes-nous en train de devenir des “singes technologiques” ?... De loin, dans la féérie nocturne des illuminations de Noël, j’aperçois Lysiane, en train d’entreprendre un quidam pour le convaincre à son tour de signer. Oui, nous ne sommes pas seul, heureusement, il y a aussi Philippe, intarissable sur la question du financement du RBI, Eric venu spécialement de Bâle pour “coacher” cette opération “Gare de Lausanne”, Alexandre le novice qui, pour ses débuts, pourra s’enorgueillir d’un très bon tableau de chasse (13 signatures). “Il paraît que, via Facebook, une personne est venue exprès ici nous rejoindre pour signer l’initiative, c’est sympa non ?” m’apprend Lysiane. Oui, c’est très sympa et cela démontre que les bonnes volontés existent, les surprises aussi, et que parfois, contre toute attente, on parvient à un résultat positif. Ainsi cette jeune femme, assise sur un banc, dans l’attente de son bus. Au début, elle a l’air tout à fait rébarbative, alors que je l’aborde en lui récitant ma formule habituelle - et magique : “Vous avez déjà signé l’initiative pour un revenu de base inconditionnel ?” Cependant, je m’accroupis à sa hauteur et ce geste, qui m’est venu spontanément, la fait subitement changer d’avis, et alors que j’en suis encore à chercher mes arguments devant son visage incrédule, elle saisit soudain ma feuille et vient y apposer sa précieuse signature. Super !
Mais maintenant, j’ai froid et j’en ai marre. Je me dirige donc, avec Lysiane, en direction du café-restaurant du Simplon, lieu de retrouvaille de notre petite équipe. A l’intérieur, règne un chaleureux brouhaha. Nous faisons les comptes : une soixantaine de signatures au total. A lui seul, et malgré son français hésitant, Eric en a récolté dix-sept, en un peu plus d’une heure. Il est vrai que c’est un vrai routinier de cet exercice délicat, qui demande un peu d’endurance mais promet aussi de belles rencontres !
jlg
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