Lors de son congrès national du 29-30 octobre, le syndicat interprofessionnel suisse Syna a décidé de poursuivre le débat interne sur le revenu de base inconditionnel qu’il considère comme une proposition importante de modernisation du monde du travail respectant la dignité humaine. « Le revenu de base inconditionnel est vu comme une chance pour les employés de pouvoir enfin accepter sans y être contraints un travail qui fait du sens. En outre, l’instauration du revenu de base renforce l’offre et la demande sur le marché. Avec l’élimination de la nécessité de gagner son pain pour vivre, les travaux simples ou jusqu’ici mal payés devront nécessairement être mieux rémunérés. Le revenu de base inconditionnel crée une véritable sécurité du revenu tout en étant non répressif. Enfin, c’est un instrument de crise qui encourage la créativité, fait tomber la peur et stimule l’activité économique », peut-on lire dans une résolution adoptée par le congrès à une nette majorité.
Une large consultation de la base syndicale autour du thème du revenu de base inconditionnel avait été organisée avant le congrès. Dès le printemps, les sections purent ainsi discuter de la question à partir de textes très bien documentés et présentant différentes positions. Lors du congrès lui-même, les papiers envoyés en retour servirent de base à un débat très vif et engagé. Certaines prises de position exprimèrent aussi les inquiétudes, réserves et critiques soulevées par le revenu de base inconditionnel au sein de la base syndicale. Avant tout, c’est l’aspect de l’inconditionnalité qui a suscité de l’incompréhension ; nombre d’orateurs et d’oratrices pouvaient se représenter un revenu de base couplé avec une sorte de service social (à la différence des programmes de type « workfare » ou des fameux « jobs à un euro » etc.). D’autres interventions ont posé le problème du sens et de l’expérience vécue du travail dans un tel contexte. Les syndicats s’engagent en premier lieu pour des emplois et des relations de travail respectant la dignité humaine, ce qui correspond aussi à l’image de soi qu’ont les employés et repose sur une forme d’identification du travailleur avec son travail. Dans ce contexte, le découplage du travail et du revenu n’est pas quelque chose d’évident. De leur côté, les défenseurs du revenu de base ont répliqué qu’au contraire, un revenu de base renforcerait sensiblement cette valeur et qualité du travail compris comme un moment d’identification personnelle.
Bien entendu, dans la salle du congrès, le débat engagé sur le podium ne parvint pas à convaincre tous les sceptiques ; néanmoins, une majorité de délégués a donné à la direction syndicale le mandat de poursuivre son engagement pour le revenu de base en tant que chance pour tous et de « soutenir cette vision d’un avenir équitable et durable que représente le revenu de base inconditionnel ».
La discussion du revenu de base inconditionnel faisait partie d’un débat plus large portant sur les fondements d’éthique sociale et qui avait été engagé lors de la première journée du congrès, le 29 octobre. Selon le syndicat Syna, l’action syndicale au quotidien, en faveur des membres et plus généralement, des employés et employées, doit être périodiquement remise en question et confirmée par de telles discussions de valeurs fondamentales.
Les racines de Syna sont marquées par l’engagement chrétien. Avec quelques 65.000 membres, c’est le syndicat le plus important de la deuxième confédération syndicale suisse, Travail Suisse, et également le deuxième plus grand syndicat de Suisse. En tant que syndicat interprofessionnel, il défend les intérêts de ses membres et prend part à la négociation des conventions collectives de travail dans les secteurs de l’industrie et des services les plus divers, en particulier dans le bâtiment et dans l’industrie.
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