Le revenu de base accorde à chaque personne légalement établie dans le pays le droit à une existence économique digne. Nul ne pourra plus être dans la précarité ni marginalisé parce qu’il n’a pas un revenu suffisant.
Comme tout le monde le reçoit, personne ne peut être stigmatisé, ni culpabilisé. C'est une différence fondamentale avec les systèmes de protection sociale actuels.
Il n’est plus nécessaire de demander une prestation sociale lorsque que nous ne pouvons trouver un travail ou que notre activité n’est pas rémunérée. Le revenu de base est inconditionnel et se substitue à l'assurance chômage, l’aide social, l’AI, l’AVS, etc., jusqu’à concurrence de son montant. Les besoins en sus resteront couverts de la même manière que maintenant.
Le chômage est devenu une conséquence systémique de la rationalisation et de la recherche de profit des entreprises. Il frappe déjà particulièrement les jeunes, les moins jeunes ou les profils moins compatibles avec le marché de l’emploi. Dans ce contexte, les mesures de réinsertion ne peuvent représenter de véritables solutions. Le revenu de base lui permet un partage intelligent du travail, en donnant la liberté aux uns de travailler moins, et aux autres qui le souhaitent de simplement travailler, ou de travailler plus.
Les progrès industriels nous ont promis de largement libérer l’homme de la contrainte du travail. Le revenu de base, en accordant à chacun la sécurité économique, réalise cette promesse en donnant à chacun le choix entre une activité plus lucrative ou plus créative (artisanat, art, recherche, relations humaines, etc.).
Tout au long de l'histoire, et cela d’un bout à l’autre du spectre politique, de nombreuses personnalités se sont prononcées en sa faveur ou pour un type d'allocation similaire. Citons par exemple le prix Nobel de l'économie Milton Friedmann (impôt négatif) ou le philosophe André Gorz (allocation universelle). Aujourd’hui, certains modèles de revenu de base existent déjà (Iran, Alaska), sont en phase d'introduction (Brésil) ou en discussion à l'échelon gouvernemental (Inde, Allemagne).
Un revenu de base peut être financé par le transfert du montant économisé sur les prestations sociales et du montant économisé par les entreprises avec la réduction de leurs charges salariales, assorti d’un impôt complémentaire qui devrait épargner les revenus modestes.
Le revenu de base inconditionnel (RBI) est un versement mensuel par une caisse publique, à chaque individu, d'une somme d'argent suffisante pour couvrir les besoins de base et permettre la participation à la vie sociale, comme une rente à vie. C’est la concrétisation d’un droit humain fondamental.
L’idée est soutenue de longue date par de nombreuses personnalités, de tous horizons politiques, de toutes confessions et de toutes nationalités. Elle est connue sous des appellations diverses : allocation universelle, revenu d’existence, revenu citoyen, revenu universel, revenu social garanti, dividende universel, revenu de vie, etc.
Le revenu de base n’est pas une prestation sociale et ne doit pas être confondu avec le salaire minimum, l’assurance chômage, l’aide sociale ou toute autre prestation attribuée de manière conditionnelle. Le revenu de base, lui, est automatique, inconditionnel et inaliénable. Il concerne tout le monde, riches ou pauvres. Il est attribué à chaque individu, de la naissance à la mort. Son montant est suffisant pour garantir à chacun une existence décente – quoi qu’il arrive. Il est cumulable avec les autres revenus (salariés ou non).
Le revenu de base est donc :
Le revenu de base rend la justice sociale compatible avec l’efficacité économique. C’est le principe de solidarité le plus libéral que l’on puisse imaginer : il permet d’assurer l’existence individuelle et la cohésion sociale, sans les rigidités de l’interventionnisme et les lourdeurs de la bureaucratie. Plusieurs variantes sont discutées concernant sa mise en pratique. Le revenu de base ne se situe pas d’un côté de l’échiquier politique : il trouve des soutiens et rencontre des réserves d’un côté comme de l’autre des frontières politiques traditionnelles.
Ni l’emploi salarié, ni les revenus du capital, ni les prestations sociales actuelles ne peuvent prétendre désormais garantir le droit à l’existence de chacun tel que défini à l’article 25 de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme.
De par son inconditionnalité, le revenu de base brise la chaîne qui fait dépendre la couverture des besoins vitaux de l’accomplissement d’un travail rémunéré. Ce découplage partiel entre emploi et revenu est nécessaire en raison de la disparition des emplois stables traditionnels. Le chômage et la précarité sont en majeure partie la conséquence d’une dynamique de rationalisation et d’automatisation qui rend l’objectif du retour au plein emploi caduc — du moins sous les conditions que nous avons connues durant 50 ans après la seconde guerre mondiale. La flexibilité de l’organisation des entreprises modernes entraîne actuellement une instabilité croissante de l’emploi rémunéré. En Suisse, en raison de la très forte compétitivité du pays, le taux de chômage reste relativement bas et l’importance des emplois précaires pour l’instant limitée. Néanmoins, il serait illusoire de considérer la Suisse comme une île coupée du reste du monde.
Dans la grande majorité des cas, la jouissance du revenu de base n’incitera pas les gens à quitter leur emploi, notamment parce que son montant ne suffira pas à couvrir tous leurs désirs de consommation.
Rappelons que le montant du RBI envisagé est de Fr. 2'500.- par mois seulement. Le salaire minimum réclamé par les syndicats est de Fr. 4'000.- Le salaire médian est de Fr. 6'200.-
D'autre part, de nombreux travaux utiles et nécessaires contribuent à la production de richesses, mais ne sont pas rémunérés - famille, bénévolat, associations etc.
Loin d’être un encouragement à la paresse, le revenu de base permettra à chacun, dans la mesure de ses capacités et de son désir, de s’engager de manière sereine, libre et responsable, dans des travaux essentiels pour l’intérêt général que les emplois traditionnels n’ont pas vocation à assumer. Le travail est toujours d’actualité et sa tâche est immense. Il est plus que jamais nécessaire que chacun puisse travailler, d’abord à prendre soin de lui-même, de ses parents, de ses enfants et de ses proches, travailler ensuite pour contribuer aux biens communs accessibles à tous (connaissances, arts, culture, logiciels, etc.), travailler enfin à inventer et à mettre en œuvre à toutes les échelles les moyens qui permettront de léguer une planète vivable aux générations futures.
Le revenu de base change aussi la donne pour les personnes aujourd’hui bénéficiaires de prestations sociales soumises à condition de ressources, ou de rentes d'invalidité. Le revenu de base est en effet cumulable avec la rémunération du travail qui garde ainsi toute son attractivité financière. Le retour à une activité lucrative n’est plus pénalisé par le risque de perdre une prestation sociale quelconque.
Le revenu de base change le caractère du marché du travail. Pour la première fois dans l’histoire économique et sociale, le salaire direct versé par l’employeur n’a plus besoin de couvrir les besoins élémentaires de l’existence, puisque ce besoin est désormais couvert par le revenu de base. Pour la même raison, en dotant le demandeur d’emploi d’une assise matérielle suffisante, le revenu de base lui rend sa liberté contractuelle et donne enfin au marché du travail le caractère d’un vrai marché. C’est avant tout dans la zone des bas salaires, lors de la négociation, que le revenu de base renforce la position de demandeurs d’emploi ayant désormais la possibilité de refuser une offre qu’ils jugent insuffisante (ce qui entraînera une revalorisation de ces emplois). Pour l’entreprise, l’instauration du revenu de base inconditionnel n’apporte pas de bouleversements : Selon les modèles de financement retenus, soit la masse salariale restera en gros la même (dans ce cas, la contribution à la caisse du RBI sera prélevé directement et uniquement sur les salaires), soit, si c’est l’entreprise comme telle qui est taxée, la diminution relative de la masse salariale au sens strict (salaires nets) sera compensée par la contribution de l’entreprise au financement du revenu de base. Mais quel que soit le cas de figure, le montant du revenu total du salarié ne changera pas (sauf dans le cas indiqué plus haut). Enfin, dans une certaine mesure, la nouvelle liberté contractuelle du salarié vient légitimer celle de son employeur et lui permet de mieux adapter ses besoins en personnel à la marche de son affaire.
On aurait tort de limiter la valeur du travail à sa valeur marchande, comme cela se passe aujourd’hui de manière croissante. Après la disparition des travaux répétitifs et ennuyeux dans un environnement rigide, ce sont aujourd’hui la pression permanente, le stress et les menaces continuelles de restructuration qui tendent le plus souvent à détruire le sens humain et créatif du travail. Au contraire, le revenu de base rétablit la valeur éthique du travail, autant vis-à-vis de la société que de soi-même.
Par ailleurs, la paresse n’est pas inscrite dans le génome humain ; ce n’est qu’une réaction contre les travaux forcés. En accordant la liberté aux travailleurs de refuser le travail, on commence à les responsabiliser. On fait tomber le prétexte de la nécessité. Sans la liberté, il n’y a pas de véritable éthique du travail.
Le revenu de base n'est pas une assistance, il correspond à un droit humain. C’est pour cela qu’il est donné à tout le monde, indépendamment des besoins particuliers de chaque individu.
Contrairement à l'aide sociale actuelle, le revenu de base n'est pas stigmatisant puisqu'il est pour tous. Il reconnait la valeur de la participation sociale de chacun et permet de s'affranchir de l'idée du travail rémunéré comme norme, norme qui a pour conséquence que ceux qui sont privés d'un emploi ont moins de valeur que les autres. Le revenu de base supprime donc cette pression qui pèse à la fois sur les chômeurs, les "assistés" et sur tous ceux qui pourraient un jour le devenir.
Mis à part ses « effets dynamiques » qui sont difficiles à estimer, du point de vue économique, le Revenu de Base Inconditionnel est un jeu à somme nulle : la valeur ajoutée du pays ne change pas d’un seul franc, mais sa répartition se modifie considérablement. Désormais une partie de la richesse créée va à l’ensemble de la population résidente sous forme de RBI, avant toute répartition entre salaires et rémunération du capital investi. La question qui reste alors à débattre concerne le canal par lequel on réalise l’opération.
Dans la majorité des cas, le revenu de base ne s’ajoute pas au revenu total, mais en devient la composante qui sécurise la part de revenu couvrant le besoin vital. Cela signifie qu’au lieu de recevoir tout son revenu de l’activité lucrative (ou de prestations sociales), on reçoit d’une part le revenu de base et d’autre part, les autres revenus en complément. Une autre manière de se représenter ce mécanisme : la partie du revenu du salarié couvrant le besoin vital est versée au travers de la caisse du revenu de base (à laquelle cotise l’employeur).
Si nous prenons par exemple comme base de calcul un RBI de CHF 2'500.- par mois pour un adulte et de CHF 625.- (un quart) par mois pour un mineur, la masse financière totale se monte à quelques 208 milliards par an, soit environ un tiers du Produit Intérieur Brut (richesse crée en un an dans le pays : en 2011 environ 600 milliards de francs). Mais comme nous allons le voir ci-après, seule une petite partie de cette somme est à trouver, car la plus grande partie est simplement réaffectée au financement du RBI sans que cela ne change les dépenses de l’Etat.
Trois sources de financements sont à distinguer, les deux premières ne représentant qu’un transfert de charges, la dernière, restant à trouver : La première source de financement est le transfert de la part des coûts des assurances et prestations sociales, allocations et autres subventions actuelles que le RBI rendra inutiles. Selon les approches, le montant de ce transfert se situe aux alentours de 62 milliards. La deuxième source de financement, que l’on évalue à quelque 128 milliards, est le transfert de la part des revenus du travail que le RBI remplace. Ce montant sera financé par les entreprises et correspondra grosso modo à la part de salaire qu’elles n’auront plus à verser aux travailleurs qui la toucheront désormais sous la forme du RBI. Enfin, la troisième source de financement correspond à la différence entre le coût total du RBI et le financement déjà disponible (le total des transferts cités plus haut), soit : 208 milliards – 62 milliards – 128 milliards = 18 milliards. Cette somme correspond approximativement à l’effort réel du RBI, c’est-à-dire l’augmentation réelle de revenu pour une partie de la population.
L’équation de base étant ainsi posée de façon quelque peu simplifiée, il faut bien se rendre compte que les différents canaux de financement sont interdépendants. Quel que soit le mécanisme concret retenu, le financement reposera sur un nouveau principe de répartition de la valeur crée par l’activité économique. Cette valeur ne sera plus répartie en deux, mais en trois parts : celle des salaires, celle des profits et celle du RBI. En effet, comme le relève aussi le Prof. émérite Peter Ulrich (fondateur de l’Institut d’éthique économique de l’Université de Saint-Gall) dans l’introduction de notre livre sur le financement, le revenu de base n’est pas une nouvelle méthode de redistribution a posteriori du revenu, mais un nouveau paradigme de sa répartition primaire. Cela signifie que le prélèvement du PIB nécessaire au financement du revenu de base se fait « à la source », là où sont générés les profits et la masse salariale.
Différentes propositions de modèles de financement existent à ce jour. Elles diffèrent en substance sur la méthode de prélèvement de la part de la création de valeur nécessaire et sur le financement du solde, les deux pouvant être couverts en bloc par une seule et même méthode de prélèvement suivant le modèle.
On peut se référer à titre d’exemple aux modèles présentés dans notre livre édité en 2010 Le financement d'un RBI inconditionnel qui propose trois modèles et à un quatrième plus récent dérivé de celui élaboré par l’économiste suisse, M. Martino Rossi. Ces quatre modèles démontrent que le revenu de base est finançable, que cela soit par une adaptation de la TVA, un impôt fédéral direct à taux fixe sur le revenu, un prélèvement à la source sur la valeur ajoutée nette des entreprises ou une combinaison de ces différentes approches. Le plus probable sera une solution mixte entre ces différentes possibilités.
Pour le solde de 18 milliards à couvrir (S’il n’est pas déjà inclus dans l’une ou l’autre des approches énumérées ci-dessus), plusieurs pistes sont à étudier. Parmi celles-ci, une taxe sur les transactions financières (type taxe Tobin), une taxe sur l’empreinte écologique, une adaptation de l’impôt fédéral direct, une augmentation de quelques points de la TVA, une réaffectation de la création monétaire, etc.
Quelle que soit la méthode qui sera en fin de compte retenue par le parlement, il est important que celle-ci répartisse la charge de financement proportionnellement en fonction de la valeur produite, comme c’est déjà le cas aujourd’hui pour les cotisations sociales. La proportionnalité est un élément-clé pour que l’insertion professionnelle reste économiquement attractive et que l’effet redistributif du revenu de base puisse s’opérer.
En résumé, quel que soit le cas de figure, ce n'est pas le volume total du RBI qui est à financer, car pour l'essentiel il s'agit du même argent dépensé autrement. Pour une majorité des salariés, le revenu total ne change pas de manière significative ; il se compose désormais d’un salaire direct et du RBI. Seules les personnes dont le revenu total augmente en raison du RBI (qui exercent des activités peu ou non lucratives, ainsi que les familles) occasionneront des coûts supplémentaires. On peut situer ces derniers aux environs de 18 milliards par année. Pour les entreprises enfin, les coûts d’exploitation devraient être sensiblement les mêmes.
Selon la solution retenue, le financement du revenu de base peut soit passer par un prélèvement obligatoire sur la création de valeur économique soit s’appuyer sur la fiscalité directe ou indirecte. Mais quoi qu’il en soit, il faut distinguer le financement du revenu de base de celui de l’action de l’Etat en général. Même si l’on a recours à l’impôt, dans le cas du revenu de base, la ponction fiscale ne bénéficie en aucune manière à l’administration publique ou à une quelconque politique interventionniste. C’est de l’argent qui va de l’économie privée à l’économie privée via la satisfaction des besoins vitaux de la population ; l’Etat n’y joue qu’un rôle fiduciaire, tandis que la liberté individuelle, telle qu’elle s’exerce aussi dans le cadre de l’économie de marché, reste intacte. Au contraire, en étendant la liberté contractuelle aux travailleurs sur un marché du travail enfin digne de son nom, le revenu de base va clairement dans le sens de la liberté individuelle.
D’autre part, le revenu de base permettra certainement de réduire le poids et le coût de la bureaucratie sociale tout en restituant au travail social toute sa dimension de soutien et d’accompagnement. Enfin, considéré d’un point de vue politique, en réduisant l’influence de l’Etat sur la vie privée du citoyen, surtout quand il est de condition modeste, le revenu de base contribuera à développer la démocratie et la liberté individuelle.
Présentation du revenu de base inconditionnel (notre dossier d'information détaillée, 25 pages, PDF) |
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Le revenu de base, qu'est-ce que c'est ? (version imprimable de cet article, PDF) |