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Nous sommes là pour donner

Dans cette vidéo, Charles Eisenstein parle du revenu de base et de ce qui motive l'être humain à agir.

Traduction simultanée en français. C'était à Genève en septembre 2013, invité par EcoAttitude.

 

 

L'économiste dit : "Je vous connais : vous ne voulez pas travailler, vous ne voulez pas contribuer. Vous n'avez pas envie de donner, parce que vous avez envie de maximiser votre intérêt personnel. Si vous aviez un revenu de base, vous resteriez assis toute la journée devant la télé à manger des chocolats."
Cette objection fait partie d'une certaine vision de la nature humaine. Moi, je ne vois pas la nature humaine de cette façon-là. Je vois que les gens quand ils ont une sécurité financière totale, peut-être qu'ils jouent au tennis et au golf pendant un temps, mais pour être heureux, très vite ils ont envie de faire quelque chose. Parce que nous sommes là pour donner. Tous ces activistes pour la paix, ils ne font pas ça pour de l'argent, non? Ils travaillent dur, ils risquent leur vie même, ce n'est pas l'argent qui les fait agir. Les artistes, les musiciens, ils peuvent avoir suffisamment de chance pour gagner de l'argent avec ce qu'ils font, ok, mais ce n'est pas leur but, ils ne se disent pas : "ok, comment est-ce que je vais bien pouvoir faire de l'argent? Je crois que je vais devenir artiste!" C'est même le contraire, ils vont voir le conseiller d'orientation et ils disent : j'aime l'art et le conseiller d'orientation dit : oh, c'est très bien, mais peut-être tu devrais aller dans la publicité.

Un revenu de base inconditionnel nous donne la liberté d'agir à partir de notre désir de donner même si cela ne rapporte pas d'argent.

Je pense que nous pourrions changer l'argent pour faire qu'il soit au service par exemple de la restauration de l'environnement. Il y aura toujours des activités importantes à la valeur in-quantifiable et nous avons besoin de soutenir les gens qui font ces choses. Nous avons particulièrement besoin de soutenir ces activités que nous renvoyons toujours dans le domaine des femmes, comme par exemple rester à la maison et prendre soin des enfants. Que cela soit un homme ou une femme qui le fasse, notre société ne soutient pas cela. Ce qui est complètement fou, car chaque société sur la terre a vu que c'est la chose la plus sacrée qu'un être humain puisse faire. Mais en Suisse qu'est-ce que vous avez comme soutien, quatre mois de congé maternité? Aux Etats-Unis nous avons même moins, deux mois ou rien du tout.

Bien sûr ça implique d'énormes changements économiques, parce que les gens ne voudront plus faire les travaux qu'ils font juste pour survivre. On doit trouver la manière de ne plus avoir besoin de ces travaux dans la société. Et les gens devront s'occuper de leurs poubelles et nettoyer leurs toilettes. On pourrait avoir une conversation complète juste à ce propos, mais je vais juste terminer avec une chose : la raison pour laquelle je sais que nous sommes ici pour donner est que nous sommes nés dans la gratitude, parce que nous n'avons pas gagné le fait d'être en vie, nous n'avons pas gagné le fait d'être né. Notre mère ne nous donne pas une facture à l'âge de dix-huit ans pour service rendu. Nous n'avons pas gagné l'eau. Nous n'avons pas gagné le soleil. Ce ne sont pas nos efforts qui ont créé le soleil. La vie est un don. Nous savons tous cela au fond de nous. La réponse naturelle à un don est la gratitude, qui est la compréhension d'avoir reçu et le désir de donner en retour. Et toute personne qui est dans une situation où elle ne peut pas donner, que cela soit dans un travail, une relation, va sentir ça : "je n'ai pas été amené ici pour ça, ce n'est pas ma vie ça". Pour terminer, une façon de regarder la transition de l'humanité juste maintenant c'est que nous sommes en train de faire une transition vers l'âge du don, c'est de nous voir nous comme les porteurs du don. C'est de voir la nature comme un cercle de don, on peut appeler ça écologie. C'est de voir les autres êtres, les autres personnes, comme des extensions de nous-mêmes, pas des êtres séparées, mais quelqu'un dont le bien-être fait partie de mon bien-être, comme dans le monde du don. Je sais que beaucoup de personnes ici sont impliquées dans les monnaies locales, et à quoi servent les monnaies locales ? A construire des structures économiques locales, des manières de faire circuler les dons pour répondre à des besoins afin que vous puissiez regarder les personnes autour de vous et dire : "tu as besoin de moi, j'ai besoin de toi". Ça, c'est la communauté.

Transcription et traduction : A.-B. Duparc

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